El Manos au Zeppelin de Saint André Lez Lille – Texte de Rachel Debrincat
La mer est si loin du Zeppelin à Saint André… Pourtant, une étonnante rencontre marine vint, ce soir là , s’échouer à nos pieds. Peut-être penserez-vous que j’ai rêvé, que mes pensées ont divagué vers un mirage, une oasis dorée, que sais-je ? Pourtant, bordée de sable et d’écumes, ruisselante d’eau salée, elle était là , portant en sa coquille de multiples messages. El Manos l’avait recueillie et débouchant délicatement le liège habité par de multiples vies, il laissa échapper dans un déferlement de vagues, des flots de missives sonores au coeur de la salle. Seules ses mains pouvaient les déchiffrer…
Etait-elle tombée de ces grandes tentures indiennes qui dessinaient le décor ?
Les tapis tanguaient harmonieusement dans le ciel. Des éléphants, des bouddhas, des couleurs orange et rouges, chaudes et envoûtantes, rendaient l’atmosphère si zen. Avait-elle glissé de la poche de son marchand pendant que se négociait le prix de ses ouvrages ? Confortablement lovée dans les rouleaux de fils, elle aurait voyagé aux milieux de badauds qui prenaient des trains, des bateaux et parcouraient le monde. C’est à ce moment précis, que notre bouteille aurait ébauché ces premiers manuscrits de notes, soigneusement pliés au fonds de sa mémoire.
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S’était-elle retrouver enchevêtrée dans une des ces nombreuses guitares ?
Un brassage multiculturel de cordes nous attendait sagement sur la scène. D’Europe, d’Asie ou d’Amérique du Sud, les Charango, mandoline et autre guitares étaient liées par les inspirations musicales du saltimbanque. Une à une, elles passeraient dans les mains d’El Manos. Ils en piègeraient les notes harmonieuses pour les mêler, en boucle, sensuellement à d’autres. Ce soir, le monde entier se retrouverait dans nos oreilles. Le luthier se serait-il endormi sur l’une d’elles, après avoir festoyé généreusement l’achèvement d’une de ces plus belles perles ? La bouteille se serait perdue dans ce dédale de cordes, emportant avec elle encore bien d’autres secrets à confier…plus tard… Des voyageurs solitaires auraient soupesé, testé la sonorité, humé ses essences parfumées jusqu’à ce qu’elle soit choisie et arrime ici.
Aurait-elle roulée ivre de musique dans une caisse confortable ?
D’autres instruments partageaient la vie d’El Manos. Une ronde de percussions faisait la pose. Eux aussi venaient de tous lieux : tambour, grosse caisse, et autres instruments dépaysants allaient agrémenter les lieux de leurs sons les plus étonnants. Aurait-elle rencontré un creux douillet dans la grosse caisse sur le quai d’un port ? La bouteille se serait réveillée, la gueule de bois, la tête résonnante. Elle aurait complété son carnet de bord de ses aventures ahurissante.
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Aurait-elle été jeté dans les bagages du musicien ?
Dès les premières notes, la salle entière accepta l’invitation au voyage musical. Sans crainte, elle se laissa porter par les mélodies harmonieuses. Rien ne pouvait arrêter de la faire vibrer, seule la voix lointaine du commandant de bord parvenait aux oreilles. Il décrivait les paysages : une plage en Thaïlande, la cime d’une montagne en Amérique du Sud, une autoroute à grande vitesse, … De ses instruments, une plage, un arbre, un bateau se dévoilaient. De sa voix, des habitants indiens lointains ou d’envoûtants chants africains revivaient. Chaque morceau montait crescendo et invitait à parcourir, à pas lents ou à grandes enjambées, un bout de chemin sur le territoire hôte. Chaque pieds suivait le rythme gaiement. On ne saura jamais comment elle est arrivée au coeur de Saint André, cette bouteille carnet de bord… Qui sait ?
Conquis, le sourire aux lèvres, le public ne voulait plus quitter les lieux. El Manos referma les pages sonores contenues dans la bouteille et s’éclipsa vers les chemins du soleil.
Si elle vient à rouler à vos pieds, ne soyez pas surpris. Jetez-y un mot et renvoyez là à la mer. Elle vous le rendra bientôt.
Texte de Rachel Debrincat